François Veyrunes, chorégraphe dont la compagnie est basée à Grenoble, nous propose de plonger dans l’essence d’un mythe. Achille un demi-dieu ! Mais, chacun le sait, le talon sera sa faiblesse et viendra fissurer sa cuirasse d’invulnérabilité lui conférant alors sa part d’humanité. Par ce projet, François Veyrunes nous interroge sur ce qui constitue un thème récurrent de son travail, l’être-sujet. Sur le plateau, les danseurs mobilisent leurs corps dans des enchaînements d’une incroyable précision et sur un tempo proche du ralenti. Et le chorégraphe de nous dire : « J’observe aujourd’hui une accélération du temps qui conduit les individus à une recherche effrénée de l’efficacité… ». C’est l’écoulement du temps, le temps de la danse, le temps présent qui s’incarne dans l’action. Comme un éloge de la lenteur ! En cela, nous percevons un prolongement esthétique rattaché aux racines du travail de Merce Cunningham, la recherche d’un corps engagé. La part d’humanité questionnée par cette proposition est celle de la dualité entre l’humain et le divin, le masculin et le féminin, les contraintes et la liberté, le singulier et le collectif. Se risquant à la limite des équilibres, les trois danseurs, par une présence soutenue et la fluidité de leurs enchaînements, accaparent notre attention. Il faut certainement une force et une puissance maîtrisée pour donner à voir cette souplesse des corps qui s’entremêlent. Tendre Achille est une performance des corps et la beauté s’y matérialise. Le plateau qui se paillette, la lumière dans un entre-deux, la gestuelle souple et continue tout comme la bande musicale, confèrent à cette œuvre chorégraphique une efficacité plastique de premier ordre.